victor del arbol : la tristesse du Samurai




Comme souvent au début des histoires il y a une femme sur un quai de gare au petit matin.
Mise élégante, talons hauts, gants de cuir, elle dénote parmi des passagers apeurés qui n’osent croire que la guerre est finie. Isabel fait partie du clan des vainqueurs et n’a rien à redouter de ces phalangistes arrogants qui arpentent la gare de Mérida en ce rude hiver 1941. Elle presse la main de son plus jeune fils et écrit à l’aîné, qu’elle s’apprête à abandonner, les raisons de sa fuite. Le train de 4 heures en direction de Lisbonne partira sans elle.
L’enfant rentrera seul chez son père, appâté par le sabre de samouraï de ses rêves qu’un homme vient de lui promettre. Isabel disparaît pour toujours. Quarante ans plus tard une autre femme a commis un meurtre et doit comparaître devant la justice des hommes mais pour cette brillante avocate, cela n’a guère d’importance. Elle est atteinte d’une tumeur cérébrale et c’est à sa mémoire qu’elle doit des comptes.
Au cours d’un procès mémorable, quelque temps auparavant, elle a réussi à faire condamner un policier véreux, ouvrant sans le savoir la boîte de Pandore. Elle a été manipulée en raison d’une tragédie ancienne dont elle ignore tout. Les rejetons d’une famille maudite cherchent à lui faire payer quatre décennies de vengeance et de haine. Des premières années de l’après-guerre à la tentative de coup d’état de février 1981, après un détour par les steppes de Stalingrad, la saga familiale est lourde de complots, d’enlèvements, de trahisons.
Sous un léger vernis de démocrates, les ex-phalangistes continuent de tirer les ficelles. Les personnages et les situations se répondent, marquant trois générations au fer rouge. Les carences affectives ont transformé les enfants en psychopathes, les victimes en bourreaux, le code d’honneur des samouraïs en un effroyable massacre. Et quelqu’un doit laver le péché originel. La Tristesse du samouraï est un étonnant roman policier qui se joue à merveille de l’opacité d’un contexte historique et un intense thriller psychologique qui mène les personnages aux limites de leurs forces pour sauver l’honneur de la lignée.
Énorme succès en Espagne, il est en cours de traduction dans plusieurs langues.
Viens de finir : 7,5/10
Ma deuxième intrusion dans l'univers de l'auteur et je dois dire que j'aime toujours autant son imagination et sa façon de peindre une toile complexe tissée par les fils des destins d'une palette de nombreux personnages intrinsèquement liés par une évènement bien particulier.
Le tout sous la forme d'un puzzle temporel où les pièces nous sont données dans le désordre grâce à un subtil jeu de flashbacks / flashforwards, pour mieux nous laisser dans le brouillard jusqu'au dénouement final.


Dans La Maison des Chagrins, il était question d'un accident de voiture, et la trame était beaucoup plus personnelle, confinée dans la petite histoire de ses personnages. Ici, dans La Tristesse du Samouraï, l'action se déroule dans la grande Histoire et "débute" en 1941, dans une Espagne en fin de guerre.
On découvre alors les dessous du Franquisme, les magouilles politiciennes pour rester au pouvoir, les violences inhérentes à la dictature et le putsch de 1981. Tout ça sert de toile de fond au roman, pour mieux expliquer ce qui relie trois générations de familles à cause d'un évènement marquant.


Un roman noir sur l'humanité et ses travers, le désir de vengeance et ses conséquence sur l'âme humaine et surtout de recherche de la rédemption.
Une écriture sombre mais subjuguante que je n'ai pas réussi à lâcher sur les trois derniers quarts, qui relate des évènements durs sans détours ni fioritures. Un souci du détail impressionnant dans la mise en scène mais surtout dans les personnages plus que réalistes.


On parle beaucoup du Polar Suédois, mais l'Espagne n'a définitivement rien à lui envier.
A réserver au plus vite dans votre médiathèque si, comme moi, vous étiez passés à côté de la hype.

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