Allan Gurganus : Ceux qui restent





Un roman composé de trois nouvelles.

Elles se passent tous dans une ville fictive des Etats-Unis "Fall".

Il est parfois compliqué de dire ce qu’on retient d’un roman. A moins que ce ne soit trop simple. Du reste, il n’est pas question ici d’un roman, mais de trois nouvelles, sises dans la petite ville imaginaire de Falls, Caroline du Nord, sur les bords de l’étroite rivière Lithium. Trois nouvelles pour Ceux qui restent. La première, « Soyez sans crainte », démarre sur un fait divers : un père décapité par le hors-bord de son meilleur ami, sa fille manipulée, perdue, consolant ce dernier d’une manière moralement peu adaptée, accouchant d’un enfant confié à l’adoption, construite dans l’oubli, une certaine forme de rigueur, avant que son petit monde très organisé n’éclate, sans prévenir. On ne sait pas trop où l’on va, mais ce n’est pas désagréable. On continue avec « Les saints ont des mères », qui possède un potentiel comique mal exploité, mais tel qu’on ne peut pas passer à côté. Le portrait de famille tracé à traits forcé est grinçant à souhait et, malgré les longueurs, on va au bout, pour savoir. Gurganus est suffisamment immoral et cynique pour qu’on veuille le suivre.

Puis vient la pièce de résistance : « Leurre ». Là, les choses se compliquent. Chez les Déchus, alors que le temps suit son cours, la rivière Lithium se fâche. Les voisins s’espionnent et s’envient, sur fond de talents projetés entièrement sur la confection (hautement artistique) de leurres volatiles. Le texte est interminable. On s’attache si peu aux personnages qu’on peine à se rappeler leurs noms, alors que les figurines d’oiseaux peintes flottant sur des eaux boueuses prennent toute la place. Un mot ? Raté. A quoi tient ce loupé ? Les personnages sont étudiés minutieusement, disséqués, contextualisés, mais ils manquent totalement d’épaisseur. A force de faire leurs individualités, Gurganus les vide de toute substance. Il agite des pantins, jamais capables de tenir leur histoire. Salué unanimement pour son style, Gurganus propose ici des textes dénués d’humanité, dans ce qu’elle a d’immédiat, vivant, charnel. Et c’est problématique, pour le moins. Les personnages s’effacent. Les récits s’estompent. On lit une démonstration, loin, très loin d’une bonne fiction. On voudrait réécrire, raccourcir, condenser. On ne peut pas. Reste ce sentiment, désagréable, d’avoir perdu son temps. D’autant plus désagréable qu’on connaît et qu’on s’attendait à un autre Gurganus..

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